62. Le français parlé au Sénégal

Les explications qui suivent sont en grande partie empruntées à l’étude de Béatrice Akissi Boutin, Randal Gess et Gabriel Marie Guèye intitulée « French in Senegal after three centuries: A phonological study of Wolof speakers' French ».

Le Sénégal, comme une grande partie de l’Afrique sub-saharienne, a fait partie de l’empire colonial de la France, période pendant laquelle le français était la seule langue officielle. Après l’indépendance en 1960, le français est resté une langue officielle. Langue de l’administration, de l’éducation, il est utilisé par environ 30 pour cent de la population. Un petit nombre de Sénégalais apprend le français comme langue maternelle.

De nombreuses autres langues sont parlées dans ce pays de 14 millions d'habitants. Six d'entre elles ont reçu le statut officiel de langue nationale. Parmi elles, le wolof est appris comme langue maternelle par 45 % de la population et compris par environ 80 % d’entre elle. C'est la première langue du pays. Comme le français, l’arabe ou l’anglais, le wolof est une langue véhiculaire.

Si l’occitan et le picard influencent l’accent du sud et du nord de la France, c’est en tant que langues romanes, appartenant à une même famille linguistique issue du latin. L’influence phonologique du wolof sur le français parlé au Sénégal est de nature différente.

ACTIVITÉ 62.1
Familiarisez-vous avec le français parlé au Sénégal en écoutant la télévision sénégalaise. Si la station diffuse de la musique au moment de votre connexion, choisissez-en une autre à partir du menu du site, ou à partir de votre propres recherches sur l'internet.

Les voyelles

  • Toutes les voyelles orales du français sont connues des locuteurs de wolof, à l’exception du [y] qui, pour cette raison, est prononcée de manière moins arrondie qu’en français standard.
  • En wolof, il arrive que les voyelles soient prononcées de manière tendue. Cette tension se caractérise par une plus grande intensité et une plus grande longeur dans leur réalisation. Ce phénomène, transmis au français, s’applique à [i], [y] et [u]. En transcription phonétique, un point (.) indique la tension du son précédent, comme le montrent ces exemples : usine [y. zin], ivoire [i. vwar], couture [ku. tyr].

Les voyelles nasales

  • Elles sont souvent dedoublées par une consonne nasale : en bas devient [ɑ̃.m ba], tendance [tɑ̃.ndɑ̃s], langue [lɑ̃ŋg] ;
  • Elles peuvent disparaître : comment devient [kɔ ma], quand même devient [ka mɛm].

Les consonnes

  • Les consonnes occlusives sourdes en position finale ne sont pas toujours prononcées. Exemple : contact devient contac, acvitiviste devient activis.
  • Les autres occlusives sont prononcées, mais sans relâchement, ce qui provoque l’ajout d’une trace sonore supplémentaire qui peut être associée au e caduc.
  • Le /R/ peut-être prononcé de différentes manières : comme r parisien (souvent dans les média), comme apico-alvéolaire ou comme dorso-uvulaire.

ACTIVITÉ 62.2
Visionnez deux ou trois minutes des vidéos suivantes en essayant de retrouver quelques uns des traits phonologiques décrits ci-dessus.

Vidéo 1 : cliquez ici

Vidéo 2 :

 

En résumé (56 à 62)

Tout le monde a un accent aux oreilles d’un interlocuteur extérieur à son milieu. Il peut être un marqueur identitaire fort ou le résultat d’un apprentissage tardif.

L’accent d’un locuteur peut être influencé de manière consciente ou inconsciente par un substrat linguistique prédominant : l’occitan dans le sud de la France, le picard dans le nord, le wolof au Sénégal.

Parmi les phénomènes les plus courants, on peut citer la prononciation du e caduc, la dénasalisation ou au contraire le redoublement consonnantique des voyelles nasales, le /R/ et l’affriquement des occlusives.

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