24. Syllabation ouverte

À L'INTÉRIEUR DU GROUPE RYTHMIQUE

Objectifs d’apprentissage
Dans cette partie, vous allez :

  • travailler sur le principe de syllabation ouverte et de jonction entre les mots ;
  • comprendre comment le principe de jonction se réalise par l’enchaînement et la liaison ;
  • vous exercer à prononcer (ou à ne pas prononcer) les liaisons.

Objectifs de réalisation :

Consultez votre syllabus pour connaître la date de remise de ce travail.

  • Fiche de travail : en ligne
  • Lire quelques vire-langues (tongue twisters) pour vous entraîner aux enchaînements vocaliques.

24. Syllabation ouverte

Huit syllabes sur dix se terminent par une voyelle prononcée. Le français privilégie donc la syllabation ouverte.

Exemple : Je voudrais une baguette avec deux pains au chocolat, s’il vous plait a 17 syllabes au total, et toutes sont ouvertes (elles finissent par une voyelle).

La proportion est inversée en anglais : dans la majorité des cas, les syllabes anglaises se terminent par une consonne prononcée. Par exemple (cité par Léon, 135), If I didn’t look at him it’s because of John constitue une phrase de 12 syllabes, dont 3 seulement sont ouvertes (25 %).

Rappel : En phonétique, on utilise beaucoup les mots ouvert et fermé. Il faut distinguer deux sens à ces deux termes. Une syllabe est ouverte si elle se termine par une voyelle. C’est une question de division syllabique. Mais une voyelle est ouverte quand, pour la prononcer, il faut ouvrir la bouche. C’est une question d’articulation.

Syllabation ouverte = la syllabe se termine par une voyelle. Exemples : [pa], [mi], [ku].

Voyelle ouverte = la voyelle est prononcée avec une grande aperture de la bouche. Exemple : [a].

Une syllabe fermée se termine par une consonne. On ne distingue pas les consonnes en fonction de leur aperture. Il n’existe donc pas, à proprement parler, de consonne ouverte ou fermée.

Syllabation fermée = la syllabe se termine par une consonne. Exemples : [duk], [muʃ], [pɔʁ].

La syllabation ouverte provoque l’alternance CV-CV-CV, etc. où C représente une ou plusieurs consonnes, et /ou une semi-voyelle, et V représente une voyelle. Ce principe de syllabation ouverte, que le français cherche à réaliser le plus souvent possible, donne une impression d’unité, d’un flux de combinaisons régulières.

ACTIVITÉ 24.1
Notez à l’aide des symboles C, S et V la distribution des consonnes (C), les semi-voyelles (S) et des voyelles (V) prononcées dans les phrases suivantes.

Exemple :  
Il a perdu son téléphone.
[i la   pɛʁ  dy sɔ̃   te  le   fɔn].
V CV CVC CV CV CV CV CVC

Vous avez la clé ?
[vu za ve la kle] ?

Il a gardé un très bon souvenir de ses vacances en France.
[i la gaʁ de ɛ̃ tʁɛ bɔ̃ su və niʁ də se va kɑ̃ sɑ̃ fʁɑ̃s].

Excusez-moi monsieur, vous pouvez m’aidez ?
[ek sky ze mwa mø sjø], [vu pu ve me de] ?

ACTIVITÉ 24.2
Le chanteur Bobby Lapointe s’est fait une spécialité de ce principe, qu’il a transformé en style humoristique. Examinez les premières paroles de Ta Katie t’a quitté :

Ce soir au bar de la gare
Igor hagard est noir (drunk)
Il n'arrête guère de boire
Car sa Katia sa jolie Katia vient de le quitter
Sa Katie l'a quitté

sə swa ʁo baʁ də la gar
i gɔ ʁa ga ʁe nwaʁ
il na ʁɛt gɛʁ də bwaʁ
kaʁ sa ka tja sa jo li ka tja vjɛ̃ də lə ki
sa ka ti la ki te

Remarquez que presque toutes les consonnes finales des mots sont rattachées à la voyelle du mot suivant. L’effet de rapidité est également obtenu par le multiplication des consonnes dites occlusives comme [k], [t].

Nécessité de la jointure
La division syllabique ne coïncide pas nécessairement avec les limites entre les mots. Par exemple, Il a mal à la tête se dira : I la ma la la têt ([i la ma la la tɛt]) et non Il a mal à la tête (*[il a mal a la tɛt]). Puisque la syllabation s’applique à l’ensemble du groupe rythmique, elle doit lier la fin d’un mot (qui contient une consonne) avec le début du mot suivant (qui commence par une voyelle) à l’intérieur d’un groupe rythmique. Dans l’exemple précédent, le "l" de il est rattaché à "a", et " l" de mal et rattaché à "a".

Cette « coagulation » des mots entre eux (appelée jointure) explique pourquoi il n'est pas possible de distinguer certaines combinaisons de mots à l’intérieur d’un groupe rythmique. Les phrases Il a mille pieds et Il a mis le pied sont prononcées de manière identique : [i la mil pje]. Seul le contexte permet de distinguer les deux sens.

Autres exemples (cités par Blanche Benveniste) :

  • Il est tout vert, il est ouvert.
  • Il est ailleurs, il est tailleur.
  • C'était mon nombre, c'était mon ombre.
  • C'était un neuf, c'était un œuf.
  • Il la dresse, il l'adresse.
  • J'entendais pas, j'entends des pas.

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